Pierre DesRochers, auteur

Dans le secret du sous-bois

Il y avait une grande forêt d’érables rouges parsemée de-ci delà de bouleaux jaunes. Je m’y promenais au printemps, après la fonte des neiges, mais avant la feuillaison. Au détour du chemin, là où le sol était plus sec, il y avait un grand champ de trilles, tout aussi rouge que les bourgeons d’érables qui ouvraient. C’était un vrai paradis de soleil, de fraîcheur et de sérénité!

Mais, des sons étonnants perçaient le silence. Il y avait, bien sûr, le « vrrp » que faisaient les ailes des mésanges qui s’affairaient autour de moi, espérant une gâterie. Toutefois, il y avait autre chose. Comme un babil d’enfant, à peine audible. Des sons qui venaient de terre.

Je scrutai le champ de trilles attentivement. Sous la plus grande fleur, un lutin discutait avec un écureuil roux à peine plus grand que lui. Ils parlaient du temps qu’il fera, des provisions que leur donnerait la forêt qu’ils devraient peut-être disputer aux humains.
L’écureuil grignotait des graines de bouleau jaune. Il avait entre les pattes deux strobiles qui se désagrégeaient, libérant les délicieuses graines. Le lutin, lui, buvait le nectar de trilles. Un petit papillon bleu, à peine plus gros que la gomme d’un crayon, se posa sur son épaule. « Dis, tu me laisses du nectar? » chuchota-t-il à l’oreille du lutin. « Mais oui, bien sûr! » répondit ce dernier.

Le lutin alla s’asseoir, adossé sur une tige d’osmonde cannelle. Une mésange, légère, se posa sur son bonnet. « Ah… ce soir... » dit-il, se parlant à lui-même. « Quoi, ce soir? » de répondre la mésange. « Ce soir, au clair de lune, les fées danseront, lumineuses et diaphanes. La fête… la fête magique! Pour enchanter les rêves des enfants endormis. » La mésange prit congé et le lutin continua ses récoltes, rêvant déjà, tout éveillé, à la danse des fées.

Pierre DesRochers
Imaginations, 2022

Si fragile…

J’étais jeune
Et je pouvais tout.
Enfin, l’ai-je cru…

Et dans les jours qui fuient
J’ai vu la maladie,
Les souffrances de mes proches,
Mes aimées, mes amis.

L’arbre perd ses feuilles
Dans la brise légère
Ou dans la tourmente.
Elles s’accrochent,
Elles tiennent bon,
Pour capter chaque rayon,
Fût-il de lune,
Chaque moment de vie.

La vie est si fragile.
À nous d’en cueillir
Les sourires, les tendresses,
Les mains tendues,
Toutes ces petites choses
Qui font la vie.

Le monde autour de nous.
La beauté des trilles rouges
Dans la lumière du matin.
La nage gracieuse des outardes,
La petite île au milieu du lac
Où elles se reposent.

Le vol des hirondelles.
Le chant du pinson
Perché sur un bouleau gris
Aux branches encore nues.
La paruline aux rameaux du mélèze.
Le petit papillon bleu
À peine plus gros qu’un caillou.

Hier n’est plus.
Mais aujourd’hui,
Aujourd’hui vit encore
Dans toute sa splendeur.
Et je rends grâce à Dieu
Pour tant de vie,
Tant de beauté.

Journal de pandémie, 2021

un rivage
et ses arbres en attente
un Fleuve, une vie

des pépiements
dans les fourrés, loin ou proche
un Fleuve, une vie

de vague en vague
la respiration de l’eau
un Fleuve, une vie

Pierre DesRochers
L’écho du vent, 2019

Les épervières

Sommes-nous épervières,
Ces fleurs de champs
Tenaces et fugaces
Dans la grisaille des jours?
Passion
De braise et de feu
Dans l’univers-cailloux
De ce monde aride
Balançant au vent
Du temps qui passe
Côte à côte.

Dans nos boîtes à chansons
Sur nos bancs d’école
Quand nous rêvions
De ce monde beau
Doux, tendre
Fraternel et juste
Nous possédions l’avenir.

Et nous sommes devenus
Amants
Travailleurs
Parents
Responsables.
Notre rêve s’écrit
Dans le geste quotidien
Malgré la routine
Les déceptions
Et tous les orages
De feu et de sang
De ce monde déchu.

Nos rêves portés
Par tous les mots
Que nous crions
À l’encre bleue des jours!
Quel poète saurait
Se taire?

Solitude et solidarité, 2017

Mes forêts

Dans la chaleur moite de l’été
Au cri des grillons, s’avancent
Mes pas nonchalants
Sous les arcs gothiques.

Érables grandioses,
Hêtres et bouleaux,
Émeraude, argent et or,
Faines, griffures d’ours.
Bois des planchers
Chaleur du foyer.

Sapins à l’écorce lisse,
Baume du Canada,
Délicieuses chanterelles.
Pins blancs ancestraux,
Buffets, encoignures,
Pointes de diamants.
Chênes majestueux,
Cèpes délectables,
Écureuils roux, tamia rayé.
Tilleul, épinette blanche
Table d’harmonie, clavecin.
Pruche centenaire,
Toc-toc du grand pic.

Sapin traînard, taxol,
Vinaigrier, thé des bois,
Gélinotte huppée.
Savoyane, plante-médecine
Chaga mystérieux.

Cerisier tardif,
Teint de jeune fille,
Rose des premiers émois.
Bruissement des feuilles
Sous les viornes en fleurs,
Bruant furtif.
Épinette noire en arène,
Lichen allumette, caribou,
Tétras des savanes,
Sable brûlant, pin gris.
Bois d’œuvre, colombage
Charpente claire.

Mésanges babillardes,
Paruline mélodieuse.
Terre odorante
Comme un encens,
Fraîcheur de l’ombre,
Brise dans les ramures.

Caresse du vent,
Forêt sérénité
Je vis en elle.
Forêt méditation
Elle vit en moi.
Nous vivons par elle.

Sève dans nos veines,
Nous sommes de pin et d’érable,
Tendres au cœur,
Durs à la tâche.

Plaidoyer pour l’espoir, suivi de Et la vie continue, 2014

Mardi prochain, le 23 mai, je lirai quelques poèmes à la soirée Musique et Poésie de l'Église Unie Saint-Pierre. Au programme de mes lectures, outre quelques-uns de mes poèmes, des poèmes de Raymond Lévesque, Richard Houle, Yvonne Péralta, Jeanne Grégoire Francine Saillant et Jean-Martin Lussier.

Ce soir, au Théâtre du Gésu, à Montréal, des artistes feront une DÉCLARATION D'AMOUR À LA LANGUE FRANÇAISE. Je suis de tout coeur avec eux. Voici ma déclaration d'amour à cette langue belle :

Ma langue

Oh! Ma langue
Ma douce langue
Mon Isle de France!
Mots du jour
Paroles d’aïeux
Mes racines
Mon âme
Mon être.

Je bouillonne et je rage
Lorsqu’on te délaisse
Et t’abandonne.
Complaisance coupable.

L’Autre est beau
Lorsqu’il est autre,
Meurtrier
Lorsqu’il m’aspire
Et m’anglicise.

Survivre
Et vivre
Et fleurir.
Telle est ma quête
Tel est mon cri!

La langue est un combat!
Je proclame
La puissance des mots!

Mon jardin et le monde, 2003
Éditions Neige

C’était un temps…

C’était un temps de nuits noires,
De maladie et de mort.
C’était le temps de la Covid.
C’était un temps d’ignorance
D’inquiétude et de fracture sociale.
C’était le temps de la Covid.

C’était un temps d’adaptation,
De solidarité, de distanciation.
C’était le temps de vaincre
La première vague.

C’était un temps de rapprochement,
D’impatience et d’inconscience.
C’était un temps de risque,
Un temps d’alerte.

C’était un temps de pleurs et de désolation,
Un temps d’éloignement et de méfiance.
C’était un temps de souffrance.
C’était le temps de la Covid.

C’était le temps
Des Cavaliers d’Apocalypse,
Des feux de forêts,
Des ouragans furieux.
C’était le temps du déni.

C’était un temps de racisme,
De violences policières,
D’armes à feu et de meurtres.
C’était un temps d’aveuglement,
D’obscurantisme.

C’est un temps de prière
Et d’action de grâce.
Un temps de gratitude
Pour chaque jour nouveau
Offert à chacun de nous.

C’est un temps d’espoir,
De foi en l’humain.
C’est un temps de prise de parole,
De rêves et de projets.
C’est LE temps
De changer le monde.

Pierre DesRochers, 2021
Journal de pandémie
La pruche et le pin, maison d’édition

L’histoire d’un siècle

Je suis allé voir le film « Simone le voyage du siècle » Un film bouleversant par les rappels historiques des horreurs du XXe siècle : l’Holocauste et ses camps de concentration; les horreurs de la guerre d’Algérie; les prisonniers, politiques ou de droit commun, méprisés, incarcérés dans des conditions inhumaines; le mépris des femmes; la haine… Terrible, éprouvant et le portrait était pourtant incomplet : rien sur les Amériques et l’Afrique noire. Rien non plus sur les millions de morts dans les goulags soviétiques ou durant le Grand Bond en avant et la Révolution Culturelle en Chine. Ça n’était pas le but du film et ça se comprend. Il y aurait tant d’autre films à faire.

Par ailleurs, un film touchant, émouvant grâce à l’humanité sans compromis de Simone Veil, sa droiture et sa ténacité sans faille. Et derrière elle, un mari aimant qui l’a soutenue inconditionnellement.

Mais j’ai une autre raison de me réjouir. La salle de cinéma était pleine et plus de la moitié de l’auditoire était composée de jeunes adultes. J’ai souvent vu des projections où la majorité des spectateurs avaient la tête grise. L’histoire, dans ce qu’elle a de plus sombre, touche ceux qui feront le monde demain. Mais aussi l’histoire dans ce qu’elle a de plus lumineux : le combat d’une femme pour une humanité meilleure, malgré la souffrance, les embûches, la haine et le mépris. J’espère que ces jeunes sauront, eux aussi, s’engager pour une humanité meilleure, malgré l’adversité de ce siècle nouveau qui est le leur.

Au-delà de la mort, Simone Viel aura laissé une trace chez les jeunes de chez moi, dans ce pays qui n’est pourtant pas le sien. Souhaitons-le durable, ce devoir de mémoire à perpétuer, pour elle et pour ceux et celles qui ont donné de leurs personnes pour soigner notre monde malade.

© Pierre DesRochers
Fragments, traces et autres vestiges de ce monde qui change
À paraître

L’espoir

L’espoir est une lanterne
Allumée dans la nuit
De nos peines.
Le souvenir de nos joies
Nos bonheurs
Nos plaisirs
Cachés au cœur
De nos mémoires de chair.
Si vacillante
Soit la flamme
Elle nous guide
Vers le jour radieux
De tous les possibles.
Ceux que nous aimons
Ceux qui nous aiment
Sont aussi des lanternes
Dans nos vies.

Plaidoyer pour l’espoir, 2014

BONNE NOUVELLE!

Vous vouliez assister au lancement du recueil collectif IMAGINATIONS, mais un empêchement a contrarié vos plans.

Vous avez écoutez l’émission SONS DE CLOCHES de notre ami Augustin Betchi sur CHYZ 94,3 le 29 septembre dernier et les propos de son invité Daniel Bernard à propos de ce recueil IMAGINATIONS vous ont ravis et vous souhaitez vous procurer cette œuvre collective.

Réjouissez-vous. Le recueil est toujours en vente à la Librairie La Liberté, au 1073, route de l'Église à Sainte-Foy !

Sons de cloches – CHYZ 94,3 FM « Sons de cloches » est une émission de toutes formes d’expression des êtres, des choses, des événements Qu’elles soient : Anodines, remarquables ou extraordinaires Locales ou globales Artistiques, scientifiques, sociales ou autres Nous suggérons de ne pas rester enfermé dans des concept...

Dans une semaine, nous aurons le plaisir de vous recevoir à la Librairie La Liberté, au 1073, route de l'Église à Québec pour le lancement du recueil de contes, nouvelles, récits et entrevues IMAGINATIONS.
Au plaisir de vous y rencontrer!

Mon recueil, le Journal de pandémie - Malgré la douleur, semer l’espoir et la beauté, publié chez La pruche et le pin, maison d’édition est maintenant disponible.

C’est un recueil de poésie (vers libres, haïkus, haïbuns) et de prose (fragments). Le recueil est dédié à mon fils Étienne.

Vous pouvez vous le procurer à la Librairie La Liberté :

1073, route de l'Église
Québec (Québec) G1V 3W2
Téléphone : 418 658-3640
[email protected]
www.librairielaliberte.com

Résumé :

Une pandémie avec ses mesures sanitaires, son confinement, ses fermetures; les amis, la famille qu’on ne voit plus; les hospitalisations, les morts par milliers.

Assumer la solitude, malgré les présences virtuelles. Je marche, je découvre mon quartier de la Pointe Sainte-Foy, ses parcs et la Base de Plein Air. Les jours passent d’une promenade à l’autre, d’un coucher de soleil à l’autre.

Jusqu’au moment tragique. La mort dans ma maison : mon fils emporté par la Covid. Colère et deuil en zone rouge. Et me voilà touché à mon tour. Mais je survis, je vis et je témoigne.

La pandémie porte à réfléchir. Après ce grand bouleversement, que deviendra notre monde? Comment le rendrons-nous meilleur, plus respectueux de la nature et de tous les humains?

Les publications de La pruche et le pin, maison d'édition, depuis sa fondation.

Aujourd’hui, c’est la Journée mondiale de la poésie et la Journée internationale des forêts. Gratitude pour tous leurs bienfaits!

Mes forêts
Dans la chaleur moite de l’été
Au cri des grillons, s’avancent
Mes pas nonchalants
Sous les arcs gothiques.

Érables grandioses,
Hêtres et bouleaux,
Émeraude, argent et or,
Faines, griffures d’ours.
Bois des planchers
Chaleur du foyer.

Sapins à l’écorce lisse,
Baume du Canada,
Délicieuses chanterelles.
Pins blancs ancestraux,
Buffets, encoignures,
Pointes de diamants.
Chênes majestueux,
Cèpes délectables,
Écureuils roux, tamia rayé.
Tilleul, épinette blanche
Table d’harmonie, clavecin.
Pruche centenaire,
Toc-toc du grand pic.

Sapin traînard, taxol,
Vinaigrier, thé des bois,
Gélinotte huppée.
Savoyane, plante-médecine
Chaga mystérieux.

Cerisier tardif,
Teint de jeune fille,
Rose des premiers émois.
Bruissement des feuilles
Sous les viornes en fleurs,
Bruant furtif.
Épinette noire en arène,
Lichen allumette, caribou,
Tétras des savanes,
Sable brûlant, pin gris.
Bois d’œuvre, colombage
Charpente claire.

Mésanges babillardes,
Paruline mélodieuse.
Terre odorante
Comme un encens,
Fraîcheur de l’ombre,
Brise dans les ramures.

Caresse du vent,
Forêt sérénité
Je vis en elle.
Forêt méditation
Elle vit en moi.
Nous vivons par elle.

Sève dans nos veines,
Nous sommes de pin et d’érable,
Tendres au cœur,
Durs à la tâche.

Plaidoyer pour l’espoir
Suivi de Et la vie continue, 2014

https://www.youtube.com/watch?v=o58-F8l196I

Christyne (Christine) Chartrand - "Mon arbre" (avec paroles) (1967) Le Québec d'autrefois - 1967 - PAROLES - MON ARBRE:(Christyne, devenue Christine, Chartrand) Il avait poussé par hasardDans notre cours sans le savoirComme u...

L'auteur-compositeur-interprète Raymond Lévesque est décédé On lui doit notamment la célèbre chanson Quand les hommes vivront d'amour.

C’était un temps…

C’était un temps de nuits noires,
De maladie et de mort.
C’était le temps de la Covid.
C’était un temps d’ignorance
D’inquiétude et de fracture sociale.
C’était le temps de la Covid.

C’était un temps d’adaptation,
De solidarité, de distanciation.
C’était le temps de vaincre
La première vague.

C’était un temps de rapprochement,
D’impatience et d’inconscience.
C’était un temps de risque,
Un temps d’alerte.

C’était un temps de pleurs et de désolation,
Un temps d’éloignement et de méfiance.
C’était un temps de souffrance.
C’était le temps de la Covid.

C’était le temps
Des Cavaliers d’Apocalypse,
Des feux de forêts,
Des ouragans furieux.
C’était le temps du déni.

C’était un temps de racisme,
De violences policières,
D’armes à feux et de meurtre.
C’était un temps d’aveuglement,
D’obscurantisme.

C’est un temps de prière
Et d‘action de grâce.
Un temps de gratitude
Pour chaque jour nouveaux
Offert à chacun de nous.

C’est un temps d’espoir,
De foi en l’humain.
C’est un temps de prise de parole,
De rêves et de projets.
C’est LE temps
De changer le monde.

Journal de pandémie
© Pierre DesRochers

HEUREUSE ANNÉE 2021!

J’écris comme un appel à autre chose.
J’écris pour lâcher prise.
Le désespoir, assumé avec détachement, la souffrance sentie et exprimée, le regard et le cœur vulnérables ouvrent les portes de possibles nouveaux, inimaginables et puissants.
Possibles qui portent des noms simples et doux : la tendresse, l’intimité, qu’on appelle amour.
La solitude la plus profonde, le deuil le plus lourd ne sont qu’intermèdes. Parce qu’au bout de toute chose fleurit la vie.
J’y crois au plus profond de moi.

Je n’ai pas l’étoffe d’un héros.
Je n’ai pas l’énergie de ceux-là qui se vouent corps et âme à changer le monde à chaque respiration.
Mais j’aime la vie et les vivants.
Et je les porte en moi comme une tendresse, une caresse sur l’Infini.
En attendant ce jour où nous retrouverons le cœur du monde, ensemble.

Plaidoyer pour l'espoir, suivi de Et la vie continue, 2014

Un trottoir de bois
sous les arches des bouleaux -
Chemin royal

© Pierre DesRochers

La lune et le grand duc

Rayon de tout bois
Chatoyant sous la lune
Odeur putride du frêne
Poussière sucrée
Du cerisier d’automne
Je suis l’arbre
Qui murmure dans la brise
Le bois souple
Le bois fort
Et l’onoclée sensible
Le trille et la violette.
Dans le chant des bruants
Tous ces feuillages papillons
Volage voltige
Reflets rosés, bois de cendre
Et tous les ors des bouleaux
À l’odeur de menthe.
Suivre le chemin invisible
Du grand duc
À pas d’ailes feutré.
Fondre
Dans un rayon de lune.

Plaidoyer pour l'espoir suivi de Et la vie continue, 2014
© Pierre DesRochers

La pruche et le pin

Dans le soleil radieux de midi
La pruche ancestrale
Sous ses bonnets d’étoupe blanche
Tend ses bras aux humains.
Et le pin, ce vieux sage
Murmure : « Petit d’homme,
Prends soin de moi
Pour que demain encore
Je porte sur mes reins
Le toit qui t’abritera.
Tel est le pacte sacré
Entre l’arbre et l’humain
De s’offrir protection mutuelle
Et longue vie. »

© Pierre DesRochers

Pourtant la paix…

Guerres et peines
Parfois l’horreur
La vie fracturée
Toutes nos douleurs.

Pourtant la paix…

Les couleurs chaudes
Du soleil couchant
La douce lumière
Du petit matin.

Pourtant la vie…

Le regard attendri
De l’enfant confiant
La fierté du père.
Le voir grandir…

Pourtant l’amour…

L’ami loyal
L’amante fidèle.
Douceur, tendresse
Au fil de jours.

Pourtant le temps…

La couleur des jours
Au temps qui passe.
Toujours cette flamme
Au fond du regard.

Pourtant l’infini…

Dans la nuit claire
Sous le vent chaud
Le cri du grand-duc
Le ciel infini.

© Pierre DesRochers
Plaidoyer pour la paix, 2016
La pruche et le pin, maison d’édition

Sur l’eau
Une cane, dix petits
Et le ballet des libellules
En chassé-croisé

© Pierre DesRochers
. . . . . . . . . . . . .

Complies

Le soir descend
La prière monte
Louange.

Pour la journée accomplie
Pour l’accueil reçu
Pour le repos
Pour l’espoir du jour prochain.

Louange.

Et pour Sa présence
À chaque heure
À chaque minute.

Louange

Les Poèmes de l'Abbaye
© Pierre DesRochers, avril 2019

Débâcle

Quand tout fond
Les lacs calent
Les rivières sont en débâcle.
La glace cède
Dans un grand fracas.

Il en va ainsi
Des certitudes qui s’effondrent
Du doute qui s’installe.
Tous les repères s’estompent.

Pourtant…
Le printemps suit
Les forêts verdissent
Les moissons fleurissent.

Pourtant…
La foi.

Les Poèmes de l'Abbaye
© Pierre DesRochers, avril 2019

Le silence de Dieu

L’église abbatiale
La lampe du sanctuaire brille
Dans la pénombre.
Le silence
La présence réelle.

Pourtant,
Rien de différent.
Chez moi, dans ma chambre,
Le même silence.
Et dans les forêts que j’aime
Comme autant de cathédrales.
Le silence…

« Adorer en esprit et en vérité. »

Et dans l’action,
Quand ma sœur, mon frère
Confiant, fragile
Vulnérable,
M’offre sa blessure.

Silence ému
Ou parole de compassion,
Le cœur, les bras
Ouverts.
Dans le bruit et la tourmente,
Il parle.
Dans les yeux consolés,
Il parle.
Dans l’âme rassurée,
Il parle.

« Écoute Israël
Le Seigneur ton Dieu. »

Le voilà parmi nous
Le voilà avec moi
Dans les yeux sombres
Dans les cœurs déchirés
Dans les peuples vaincus
Dans les femmes bafouées
Dans les enfants abusés.

Écoute et regarde
Le profond silence de Dieu
Dans les cris et la tourmente
Du monde affairé,
Aveugle et sourd,
Le silence des laissés-pour-compte
Le silence des sans voix.

Ils sont le sanctuaire
Qu’Il a choisi.

Les Poèmes de l'Abbaye
© Pierre DesRochers, avril 2019

Confiance

Le jour décline
Derrière la blancheur des nuages.
Quelques feuilles
Très rares
Battent au vent.

Dans la grisaille
Des troncs bien droits
Nus, dépouillés,
Le sapin, l’épinette
Colorent la forêt d’espérance.

« Confiance, clament-ils,
Tout reverdira.
Du tendre au vif,
Le vert reviendra.
Déjà la vie bouillonne
Dans la sève de nos frères
Aux ramures dégarnies. »

La vie…
Endormie mais vraie,
Imparable.

Les poèmes de l'Abbaye
© Pierre DesRochers, avril 2019

Une vie

Une vie
Mile et mille pas
Vers quel horizon?

Une quête
La lumière
L’amour, la tendresse.

Chercher
L’intime des choses
L’intime des êtres

Toucher l’âme
Par des chemins de tendresse
Fleuris de compassion.

Une vie…

Les Poèmes de l'Abbaye
© Pierre DesRochers, avril 2019

Moment de paix
Silence, nuages
Et portions de ciel bleu

Le dépouillement
L’oraison
L’abandon

La grâce

Les Poèmes de l'Abbaye
© Pierre DesRochers, avril 2019

Derrière les cèdres
Descend le soleil

Devant, le blanc des bouleaux
Et quelques feuilles brunes
Oubliées aux branches des chênes

* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * *

Orion brille
Au-dessus des conifères
- Début d’avril

Les Poèmes de l’Abbaye
© Pierre DesRochers, avril 2019